Appliquer des pratiques favorables aux plantes messicoles

Les plantes messicoles sont inféodées aux champs cultivés sans lesquels elles ne pourraient pas se maintenir. Ainsi responsable du maintien ou de la disparition de ces espèces, l’agriculture peut soutenir la biodiversité de nos campagne grâce à des pratiques raisonnées. La gestion agricole influence la répartition et l'abondance des plantes messicoles à différentes échelles, de la parcelle à l’exploitation. Les caractéristiques du système d’exploitation, conventionnel ou en agriculture biologique, ne suffisent pas à expliquer la présence des plantes messicoles. Pour maintenir la flore messicole en place il convient plutôt de combiner des pratiques favorables et réduire l’intensité des pratiques agricoles reconnues négatives.

 

Réduction ou abandon des herbicides

Plusieurs pratiques agricoles sont connues et reconnues comme étant plus ou moins favorables à la présence des plantes messicoles dans une parcelle agricole. Le désherbage est la pratique qui a l’effet négatif le plus direct. Les herbicides éliminent les plantes messicoles dès la germination. La réduction du nombre de passage d’herbicides voire leur abandon est donc une condition du maintien des plantes messicoles.

L’utilisation de doses de produits  inférieures à celles recommandées peut permettre un contrôle satisfaisant des adventices indésirables sans impacter trop fortement les espèces messicoles. De même les parcelles de céréales traitées à pleine dose qu'une seule fois présentent un nombre de plantes messicoles plus important.

En cas d’infestation limitée à une petite surface, un traitement peut être appliqué de manière localisée. Les plantes messicoles menacées étant majoritairement des dicotylédones, un traitement sélectif anti monocotylédones peut être utilisé pour lutter contre certaines espèces problématiques.

Enfin, si la technique du faux semis, avec une destruction mécanique des germinations d’adventices, est néfaste pour les messicoles à germination précoce, elle peut être utilisée comme alternative lorsqu’elle est intégrée à une séquence de pratiques favorables aux plantes messicoles.

 

Une fertilisation limitée

L’emploi d'engrais azotés et d'amendements enrichit les sols, favorisant ainsi la présence d’espèces nitrophiles au détriment des plantes messicoles plus oligotrophes. Des apports d’azote limités (de 50 à 60 kg/ha) conviendront au maintien des conditions chimiques et biologiques du sol répondant aux exigences des plantes messicoles.

 

Travail du sol limité en profondeur

La profondeur de travail du sol et l’outil utilisé conduisent à une sélection des espèces en fonction de leurs caractéristiques biologiques. Un labour profond sélectionne des espèces à graines dormantes de longévité importante, qui sont capables de survivre et de germer lorsqu’elles seront remontées à la surface tandis que les graines à durée de vie courte seront incapables de germer.

Un travail d’automne peu profond, inférieur à 20 cm, avec utilisation d’outils évitant de retourner le sol (herse rotative ou cover crop par exemple) est favorable aux plantes messicoles et limite le développement d’une flore herbacée à reproduction végétative. En revanche, l’abandon de tout travail du sol pour pratiquer un semis direct est néfaste aux messicoles.

Si un travail plus profond est nécessaire afin de décompacter le sol, le labour peut être remplacé par l’utilisation de décompacteurs ou sous-soleuses à dents qui permettent d’obtenir une terre plus fine sans retourner le sol et par conséquent sans enfouir profondément les graines présentes.

Pour les vivaces comme les tulipes, le travail du sol permet de séparer les bulbes comme pourraient le faire les animaux fouisseurs en milieu naturel ; il est donc conseillé là encore d’effectuer un labour superficiel ou un décompactage pour les maintenir.

 

Tulipa agenensis

Rotations favorables

Les plantes messicoles ont un cycle similaire à celui de cultures annuelles et sont par conséquent adaptées à des rotations courtes privilégiant les céréales d’hiver. Les exploitations en polyculture-élevage sont celles où l’itinéraire technique est le plus favorable aux messicoles. Céréales (2-3ans) / Jachère (1 an) / Prairie (2-3ans). La phase prairiale, essentielle dans le système polyculture-élevage, ne devrait pas excéder plus de 3 ans pour ne pas pénaliser les messicoles, qui sont majoritairement une banque de graines à faible longévité séminale.

D’autres cultures favorables peuvent être incluses dans la rotation comme le colza, le lin d’hiver ou des légumineuses à semis automnal.

La présence de cultures de printemps (tournesol, soja, sorgho) dans la rotation est défavorable car leur mise en place coïncide avec la période de croissance de la majorité des messicoles.

 

Origine et tri des semences

Le re-semis de semences fermières favorise la dispersion des messicoles dans la mesure où elles sont peu ou pas triées. Cette pratique reste autorisée en France à condition qu’il n’y ait ni vente ni échange.

 

Conservation des chaumes

Un déchaumage précoce a des impacts sur les plantes messicoles à floraison tardive, comme la Nigelle de France (Nigella hispanica var. parviflora) ou le Pied d’alouette de Bresse (Delphinium verdunense). Conserver les chaumes de céréales jusqu’à la fin de l’été leur permet de fructifier et ainsi de se maintenir.

Nigelle de France

L’importance des bordures de champs

Moins perturbés par les pratiques culturales, avec une densité de culture parfois plus faible, les bords de champs constituent des zones propices au maintien de la diversité floristique. Conserver une bande non traitée et non fertilisée entre 1 et 5 m de large autour du champ avec une densité de semis plus faible peut ainsi favoriser les plantes messicoles.

 

Les pratiques agricoles s’insèrent dans un système d’exploitation qu’il faut percevoir globalement si l’on veut mettre en place des mesures durables de conservation. L’effet cumulé de certaines pratiques appliquées à la parcelle agit positivement sur les plantes messicoles (telles que : un labour, pas de faux semis et pas de désherbage). Il permet d’intégrer une pratique réputée défavorable comme une fertilisation azotée modérée.